Mongolie

Mercredi 20 août 2014 – Le transmongolien

22h02, heure de Irkoutsk, départ du train pour Oulan-Bator.  On peut dire que nous sommes devenus des pros de l’organisation dans notre petite cabine-couchette.  Les sacs à dos, en haut à gauche, l’enfant en haut à droite.  Les draps nous sont remis.  Jean-Pierre retrouve ses gestes de chirurgien : dissection du sac plastique sans tirer les tissus (ça sert de poubelle après !), il tend la serviette de toilette à son assistante qui la range soigneusement au-dessus de la porte, puis la taie d’oreiller, le dessus de couette et le drap, tous les champs sont installés un à un consciencieusement.  Puis, entre 2 interventions, Monsieur va faire un petit tour entre 2 salles voir comment ça se passe.  Quand soudain, entre et s’installe, comme un porc sans gêne, un mannequin slave sur un des lits : surprise de Delphine (« c’est qui, la nouvelle ?... ») !, qui vérifie qu’elle ne s’est pas trompée de cabine en jetant un œil pour voir si son fils est bien perché sur un des lits du haut.  Oui, c’est bien le cas : donc, on explique à la jolie demoiselle qu’elle s’est trompée de cabine, provoquant la grande déception du Jean-Pierre, qui croyait à un cadeau, déjà prêt à lui laisser une petite place !!!  Mais, comme il n’est pas rancunier, il m’avait réservé aussi un petit cadeau : Genghis Khan le mongol, plutôt ghis qu’à jeun d’ailleurs, qui, lui aussi, veut venir faire un petit tour dans la cabine-couchettes !  Que de monde ce soir !  Bref, la porte sera verrouillée, et le petit canif de Fifine à portée de main pour la nuit, on ne sait jamais !


Mais… surtout…enfin ! ça y est ! On a passé des niveaux, et nous avons droit à la provodnitsa terrifiante Mère Dragonne du wagon, qui refuse de nous donner des tasses pour une raison qu’elle seule connaît !  La nuit porte conseil… nous allons échafauder un plan pour l’affronter demain, ou la contrer !

En gare d'Irkoutsk, avant le départ

Jeudi 21 août 2014 – Passage de la frontière Russie-Mongolie en transmongolien

La nuit porte conseil, mais pas à tout le monde.  Miss Dragonne est toujours d’une humeur exécrable ce matin, ce qui après la méthode douce, lui vaut un tir de Jean-Pierre, seule solution radicale selon lui : et ça marche ! Il nous l’a presque transformée en Princesse Charmante !  Et la solution pour avoir 2 tasses était finalement d’acheter un sachet de thé, tout simplement : nous avons pu ensuite en profiter tout le long du voyage, des tasses mais aussi de la bonne humeur de notre nouvelle copine. 


Nous avons passé la journée dans le train, mais celui-ci n’a pas tellement roulé.  Arrivés à Naouchki vers 13h30, nous en sommes repartis 5 heures plus tard.  Naouchki est le dernier arrêt du transmongolien en Russie.  Nous étions le seul wagon sur le quai, pas une locomotive à l’horizon pendant des heures : il y a un air de no man’s land.  Par contre, pourquoi restons-nous stationner 5 heures là ? Aucune idée, à part peut-être pour nous donner l’occasion de voir les dernières nouvelles via un internet gratuit dans la gare de Naouchki !  En fait, tout s’accélère la dernière heure, où l’on doit rester bien sagement assis dans son compartiment, car passent successivement policiers russes, douaniers russes, fouille des bagages, Lassie…  Puis on reprend les rails, et 20 km plus loin, arrêt à Saoukhe-Bator, première ville mongole, et c’est reparti pour 2 heures d’attente avec policiers mongols, douaniers mongols, fouille des bagages, Lassie mongole,… Bref, à la nuit tombée, ça y est : nous sommes en Mongolie, pays d’Asie, coincé entre 2 géants voisins, la Russie et la Chine, pays aux consonances sauvages, comme sa nature, ses steppes et ses déserts, comme ses chevaux, comme ses nomades, comme ses héros.  3 semaines pour découvrir un peu de cette contrée, qui fait rêver tant de voyageurs depuis Marco Polo, mais pour l’instant, il fait tout noir et nous essayons de nous rendormir un peu avant notre arrivée très matinale prévue à Oulan-Bator.

C'est cool le transmongolien!

Frontière russo-mongole: on a perdu la machine!


Premières steppes mongoles



Passager clandestin

Vendredi 22 août 2014 – Oulan Bator

Oulan Bator, la ville du « héros rouge » : rien à voir avec l’illustre guerrier du pays Chinggis Khan, mais avec Sükhbaatar, héros de la révolution bolchévique après l’indépendance de la Mongolie (à entendre vis-à-vis de la Chine) en 1911.
Dans les guides, Oulan Bator est décrite comme une ville grise et moche, et comme la capitale la plus froide du monde.  Pour ce qui est de la première affirmation, nous ne saurions dire encore en posant les pieds sur le quai de la gare, mais pour la deuxième, oui ! Le thermomètre n’aura pas dépasser les 10°C de la journée !  Apparemment, c’est ainsi depuis 2 jours, mais ça devrait s’améliorer…

Nous allons droit chez Galina, ancienne prof de russe à l’université de Mongolie et son mari,  un couple de personnes âgées, qui nous accueille pour la nuit, non loin du centre-ville.  La maisonnée et la ville sont encore endormies, alors nous faisons de même et repiquons un petit somme, après la nuit agitée que nous eu dans le train. 
On ressort les pulls dans la matinée, et nous partons découvrir Oulan Bator.  Moche et grise, c’est un peu exagéré.  Dès qu’un brin de soleil survient, la ville s’éclaire, et on aperçoit des collines arides non loin du cœur de la capitale.  Le centre-ville n’est pas très grand.  Il y a surtout la place centrale de Sükhbaatar, avec l’imposante statue de Chinggis Khan devant la maison du gouvernement.  Les drapeaux chinois et mongol sont hissés, et une délégation en costumes traditionnels apparaît : les villes de Oulan-Bator et Pékin sont officiellement jumelées depuis 3 jours.  Cela nous donne un avant-goût de ce que nous allons découvrir dans le pays, un peu plus reculé. 

Echec pour le musée d’histoire naturelle de la ville, où nous voulions aller observer les œufs de dinosaures trouvés dans le désert de Gobi, car celui-ci est en réfection.  Du coup, on se rabat sur le musée national d’Oulan-Bator, et nous ne serons pas déçus de la visite.  Celui-ci retrace l’histoire du pays, de la préhistoire et des premiers peuples de Mongolie, en passant par le 13ème siècle et les conquêtes de Chinggis Khan (qui a tout de même réuni le plus grand empire de tous les temps, surpassant Alexandre le Grand, les romains et Napoléon – et la question qui reste en suspens : héros violent et sanguinaire, ou diplomate et innovateur, ou les deux, mon capitaine?...), puis la période soviétique et post-indépendance de 1990.  Les collections sont intéressantes, le musée pas très grand : idéal pour le petit bonhomme, qui se régale juste comme il faut.  Après quelques heures passées à Oulan-Bator, on ressent qu’on s’est rapproché de l’Asie de l’Est, de la Chine, que ce soit sur le plan architectural avec les monastères bouddhistes qui font leur apparition, ou sur le plan du morphotype et du comportement.

Nous rentrons chez Galina, pour une pause-goûter, devoir, repos.  Demain, nous partons pour 3 semaines de périple, un programme intensif, mais qu’on a hâte de vivre.

Chinggis Khan, Oulan-Bator, enfin!

Mini-hun







Marco Polo

Samedi 23 août 2014 – Le monastère de Gandan et le parc Hustai Ruu

Avant notre départ pour la grande boucle de Mongolie, nous nous arrêtons au monastère de Gandantegchilen, le plus grand monastère de Oulan-Bator (les Mongols sont pour plus de 80% bouddhistes), et un des seuls ayant survécu au passage soviétique. La place est envahie de pigeons, plus que de visiteurs en ce matin, où débutent des prières récitées par les moines bouddhistes.  Un des temples abrite une immense statue en or et pierres précieuses, qui a été refaite il y a une trentaine d’années, l’originale ayant été fondue à Moscou pour en faire des balles d’artillerie.  Le voyage étant béni, nous quittons Oulan-Bator.  Le centre-ville de la capitale n’est certes pas très grand, mais long est le trajet avant d’apercevoir la fin des faubourgs d’Oulan-Bator.  Loin sur les collines sont perchées de petites maisons aux toits colorées, puis, en bordure de ville, des yourtes de nomades sédentarisés avec leurs troupeaux. Sur un peu plus de 3  millions d’habitants en Mongolie, un tiers habite à Oulan-Bator.  Par contre, la densité sur le pays est une des plus faibles au monde, vu l’étendue du territoire.  On comprend mieux aussi pourquoi Oulan-Bator est une des villes les plus polluées en hiver : encaissée entre les montagnes, avec tout ce petit monde se chauffant au charbon de bois, ça fait entonnoir.  Le gouvernement essaie d’améliorer tout cela avec un projet de nouvelle ville s’étendant jusqu’en 2026.

Nous nous arrêtons avec notre chauffeur, Bayarbat, et notre guide, Jijgee, faire quelques courses supplémentaires.  Le 4x4 était déjà bien chargé avant notre départ : on va vivre comme des nomades pendants les 3 prochaines semaines, ce qui rend Noé tout excité !  Notre première étape est le parc national Hustai, à environ 80 kilomètres de Oulan-Bator.  Dès la sortie de la ville, on ne voit que des étendues sauvages d’herbes rases, des troupeaux de chèvres, moutons et chevaux en liberté, quelques yourtes éparses, mais pas embêtées par les voisins, c’est certain !
On ne peut pas poser sa tente comme on veut dans le parc national de Hustai.  Aussi, nous arrêtons-nous vers l’heure du déjeuner dans un camp de yourtes, une trentaine au moins, fort bien aménagées.  Par contre, nous non plus, nous ne serons pas ennuyés par les voisins : c’est la fin de la saison touristique et nous sommes les seuls voyageurs présents.  Au moment du déjeuner, nous commençons à faire plus amples connaissances avec notre chauffeur, qui ne parle quasiment que mongol, et notre guide francophone, qui lui par contre manie la langue de Molière plus que bien, ayant passé 4 ans à Chalons en Champagne, à étudier à l’Ecole du Cirque, ce qui lui vaut déjà une admiration ébahie de Monsieur Noé ! 

Après une courte sieste, consacrée surtout à l’apprentissage des doubles et des moitiés pour Noé, nous nous rendons au parc Hustai lui-même.  Un car empli d’allemands vient d’arriver.  Nous avons droit à une courte projection, version française sur la faune et la flore du parc, ses projets scientifiques, et ses origines.  Belle histoire que ce parc d’ailleurs, celle d’un hollandais et d’un mongol qui décidèrent de réintroduire les chevaux de Przewalski, celui-là même dont nous avons visité le musée à Karacol au Kirghizstan.  Ces chevaux, ancêtres préhistoriques des chevaux que nous connaissons, avaient quasiment disparu de la planète, en-dehors de quelques spécimens gardés dans des parcs privés ou des zoos en Europe, les autres ayant été victimes ou trophées de chasses à la grande époque soviétique.  Ainsi, la réintroduction des chevaux eut lieu avec succès : on compte désormais plus de 2000 chevaux de Przewalski à l’état sauvage, seul espèce équine non domptée à ce jour, présente uniquement en Mongolie.  Et cette faveur, ce plaisir de pouvoir les observer nous a été offert à la tombée du jour, lorsque les chevaux descendent des montagnes pour venir s’abreuver aux points d’eaux.  C’est vrai qu’ils ont un air préhistorique, ces chevaux : nuque dans l’axe du corps, impression de crâne aplati, et petite taille.  Nous restons un bon moment, là, assis dans les steppes à les observer, sans nous lasser… Sur le chemin du retour, quelques marmottes montrent furtivement le bout de leur nez, mais pas les loups, tant redoutés par le petit Noé, et pourtant si présents aux alentours. 

La nuit tombe, et le froid avec.  Installés dans notre yourte, et alors que nous commencions à penser avec nostalgie aux bouillotes glissées sous le lit dans la forêt de Bwindi, c’est avec bonheur que nous voyons arriver 2 jeunes filles, bois et charbon dans un seau, qui vont nous allumer un poêle, qui en moins de 5 minutes nous réchauffe tant qu’il nous faut ouvrir la porte de la yourte pour un peu d’air frais !  Noé nous balance un « je vous avais bien dit qu’on allait allumer le feu ! », pas peu fier, et passera la nuit bien au chaud sous ses couettes, heureux comme un ange.


Moulin à prière du temple de Gandan

Jean-Pierre, on t'a reconnu!

Trouvez les 7 erreurs sur les pigeons!



Petit bouddha

Allez, une plus facile pour le jeu des 7 erreurs!


Pour le nom des divinités, ne comptez pas sur nous

Il n'a pas l'air, mais c'est un gentil!


Au parc Hustai



En mode camouflage pour observer les Przewalski

Ah! les voilà!



C'est vrai qu'ils ont une tête préhistorique...
Première yourte: ça caille!


Dimanche 24 août 2014 – Monastère d’Amarbayasgalant

Pas peu fier au coucher, mais moins fier au réveil, le petit Noé, à la vue de la belle araignée qui se ballade sur sa couette, ce qui nous vaudra un bon éclat de rire dès le matin !

La cuisine était fameuse dans ce petit camp de yourtes près du parc Hustai.  Hier soir, nous avons dévoré un plat mongol, fait de pâtes avec des légumes et quelques morceaux de viande, une sorte de chow mein mongol.  Après un copieux petit-déjeuner, nous partons pour quelques heures de route, 5 environ, au nord de Oulan-Bator, vers le monastère d’Amarbayasgalant.  La route est tranquille.  En tout cas, pour nous : nous assistons tout de même au 2ème carambolage en 2 jours.  Après avoir rejoint Darkhan, qui est la 3ème ville du pays, où nous traversons les rails du transmongolien, nous nous arrêtons faire un petit pique-nique au bord de la rivière.  Au camp de yourtes de la veille, on nous avait préparé le MacDo mongol: des sortes de beignets fourrés à la viande, délicieux ! Noé, un peu repoussé, se laissera convaincre et finalement, en dévorera 2, mais ce n’était pas non plus la magic box : il n’y aura pas de petit jouet, faut pas rêver !  Qu’à cela ne tienne, une bonne pastèque, rose en dedans, fera bien l’affaire en guise de dessert !

Un peu fatigués et vessie pleine (pas facile pour les mesdames de trouver un stop-pipi dans ces steppes, où pas une herbe ne dépasse le centimètre, et pas un rocher où se cacher !), nous arrivons au monastère d’Amarbayasgalant.  Celui-ci se dresse majestueusement, juste au milieu de  nulle part.  Seules quelques yourtes sont présentes, et encore, pas si nombreuses vu l’espace, des troupeaux entiers de centaines de têtes de bétail broutant tranquillement, pas mal de voitures croisées aussi de retour de week-end.  C’est l’un des plus anciens monastères de Mongolie ayant résisté en partie à l’invasion bolchévique, datant du 18ème siècle.  Les statues sont vraiment imposantes, surtout le bouddha trônant sur la colline au-dessus du monastère.  Noé est le plus vaillant, comme toujours il se dit fatigué, mais il ne faut pas en croire un mot !


Les voyageurs du week-end sont quasiment tous repartis.  Des déchets trainent un peu partout, bouteilles, papiers, sacs plastiques…  Après une réflexion désolée de constater que les mongols ne sont pas préparés à la société de consommation et ses travers, nous serons heureusement surpris, au crépuscule, de voir de nombreux habitants du village proche du monastère ramasser les déchets.  De retour à la voiture, nous ne faisons que quelques mètres avant de choisir l’emplacement idéal pour notre bivouac de la nuit.  Là, c’est juste l’extase pour Noé : « Non, mais, vous vous rendez compte ? On fait tout comme les cro-magnons, là ! » !  A savoir monter la tente, chercher des pierres et du petit bois pour le feu… quand vient la question fatidique du descendant en ligne directe de ces mêmes cro-magnons : « mais, où sont les toilettes ? » !!!  C’est là, que commence vraiment notre voyage, alors ça se fête à la vodka, qui, paraît-il, existait déjà au temps de Genghis Khan !  Quand on voit un troupeau de chevaux sauvages passé juste à quelques mètres de nous au moment où nous montons notre campement, on se dit que vraiment pour la Mongolie, il n’y a pas de surprise : c’est exactement comme nous l’imaginions, magique !...

Le nuggets mongol


Roulotte mongole pour les tahitiens

Celui-là, on pense qu'il n'est pas gentil!

Les 2 biches, premières adeptes du bouddhisme: biche, ô ma biche!








C'est un vrai!





Monastère d'Ambaryasgalant

Conflit de générations: moto-cheval


Le premier feu des mongols, et pas de jeu de mots!


Première vodka

Conflit de générations aussi!

Leçon d'écologie mongole

Les voisins du soir



Il est bon ce feu!

Jijgee et le hun-demi


Le coin vaisselle


Lundi 25 août 2014 – Edernet et le volcan Uran Togoo Uul

C’est bien réchauffés par le feu de Noé et son papa que nous nous sommes glissés sous nos couettes hier soir, et nous n’avons pas eu froid du tout !  Par contre, la pluie s’est invitée dans la nuit, avec même quelques éclairs.  Mais la tente a fait ses preuves : prêts à recommencer le bivouac ce soir !  Noé, lui, a bien sûr dormi comme ses copines les marmottes, qui ne manquent pas dans les steppes mongoles en ce début de matinée ensoleillée.

Après le petit-déjeuner, on replie les tables, sacs et tentes, et reprenons la route vers l’ouest.  Après avoir traversé des champs de blé, pas encore tout-à-fait mûr, dit bonjour aux petites marmottes-écureuils qui ont l’air de nous saluer sur le chemin, nous arrivons à Edernet, la 2ème ville du pays.  Celle-ci est grande, mais pas trop en fait.  On en a vite fait le tour ; d’ailleurs ce ne sera pour nous qu’une pause-déjeuner, où nous goûterons pour la première fois le thé mongol.  Celui-ci est préparé avec du lait, mais a surtout la particularité d’être salé.  Noé ne trouvera pas cela terrible après avoir lapé quelques gouttes du breuvage, Jean-Pierre est hors-jeu intestinal, et moi, j’ai trouvé ça plutôt pas mal !  Ca ressemble à du bouillon en fait.

Nous arrivons dans l’après-midi au milieu du parc des volcans Uran Togoo Uul.  Il n’y a qu’un seul volcan, qui a un air d’Auvergne, au milieu de la steppe.  Nous grimpons en haut du cratère, dont on fait le tour : environ 500 mètres, avec au milieu sapins et petit lac, et tout autour, à l’infini, des steppes, quelques montagnes, une ou deux yourtes perdues dans l’immensité et des centaines de têtes de bétail.  Un paysage dont on ne se lasse pas, et qui pourtant pourrait sembler monotone au bout d’un certain temps.  Mais la sensation d’infini est troublante et enivrante.  Nous ne pourrons pas cueillir de fraises des bois, d’autres promeneurs sont passés avant nous : tant pis pour le dessert de ce soir ! 

C’est au pied du volcan, sur une colline secondaire emplie d’edelweiss, entre ciel et steppe, que nous monterons la tente ce soir.  Pas facile durant ce voyage nomade de faire école à Noé.  Alors, on travaille sur l’iPad en voiture dans la journée, et on essaie de faire au moins une page d’écriture dans la soirée.  Mais il y a tant à faire pour le petit bonhomme : monter la tente (il est responsable des sardines et du choix de l’emplacement), ramasser des pierres et du bois pour le feu, courir après les petits écureuils, tenter de faire de la farine avec les 3 épis de blé ramasser en chemin…  Bref, le soir au coin du feu, il est vite ensommeillé le petit aventurier.  Par contre, la nuit, il est pire qu’Attila, qui disait « là où mon cheval passe, l’herbe ne repousse pas » : le hun-demi, lui, c’est « là où il passe, le duvet trépasse » !  Parce qu’il remue tellement sous la tente : c’est le plus petit, mais il prend toute la place !



2 coquelicots dans un champ de blé

Les mongols

Le thé salé: essai non concluant!

Stupa des steppes

Escalade du volcan Uran Togoo Uul

Le cratère


Tombes de huns en bas du volcan





2ème feu, 2ème vodka!


Des champs d'edelweiss: que du bonheur!


Mardi 26 août 2014 – Bai Bulag et Ikh Uul

Nous avons eu tout de même un peu de mal à nous endormir hier soir : éclairs, tonnerre et pluie s’étaient encore donnés rendez-vous.  Mais heureusement, le soleil est là le matin : on s’imaginait mal tout replier sous la pluie !  Pour l’instant, croisons les doigts : on a de la chance avec le temps ! 
Juste avant notre départ, nous saluons un ancien général hun, enterré au milieu des steppes : un amas de pierres au centre d’un carré, et des petits monticules au nombre de 7, témoignant du haut rang du personnage gisant sous terre.

Nous avons eu une bien longue route aujourd’hui entre Togoo Uul et Ikh Uul.  D’autant plus que c’était de la piste quasiment tout le long du trajet.  La route est en cours de construction, par les chinois, dont les camions sont les seuls véhicules que nous rencontrons en chemin.  Par contre, pléthore de vaches, moutons, chèvres, chevaux et petites marmottes !

A mi-chemin environ, se dresse devant nous la forteresse de Bai Bulag, enfin ce qu’il en reste.  Celle-ci date du 8ème siècle, construite par les Ouïghours, des turco-mongols, qui occupaient la région.  Un petit point d’eau peu après est le bienvenu pour le pique-nique, et nous permet de faire la vaisselle.  C’est Noé qui s’y colle avec ravissement, sous l’œil d’un troupeau de veaux qui viennent s’abreuver à midi.  C’est une bonne idée, ça lui permet au moins de lui laver les mains et les ongles, qui commencent à être un peu crados !

Et puis là, à quelques kilomètres à peine de l’arrivée, au pied de la montagne Ikh Uul, la crevaison !  Il paraît que c’est, comme en Afrique, un immanquable du voyage : et bien, c’est fait !  Noé assiste à son premier changement de roue (encore une bonne leçon de débrouillardise), puis à la réparation de la roue au village voisin.  Le mécanicien le prend pour un petit russe, ébahi par ses 2 perles bleues au milieu du visage, qu’il se hâte de faire montrer à toute sa famille.

Et ça y est : on a trouvé le coin idéal pour le bivouac de la nuit, près de la rivière Selengue, une des plus grandes de Mongolie, qui se jette dans le lac Baïkal.  C’est le bonheur pour Noé : « On dort sous la yourte ou la tente ? » - « Sous la tente » - «  Ah ! j’espère ! c’est trop cool de dormir sous la tente ! »  -  ou la facilité d’adaptation de cet enfant, qui se régale dans les bungalows sur pilotis des hôtels de luxe près du lagon, et en camping tout aussi simplement.  Cela rend ses parents pas peu fiers…

La tentative de pêche fût infructueuse : pas à cause des pêcheurs, pas à cause des poissons qui grouillent dans la Selengue, mais le matériel a fait défaut avec un moulinet qui ne moulinait guère !  Donc, pas de poisson au dîner de ce soir, ce qui n’est sûrement pas pour déplaire à Jijgee et Bayardat, qui, en bons mongols, sont surtout fans de bonne viande.
On repense à notre semaine chez les indiens Shuars en Amazonie en nous baignant dans la rivière, qui craint moins quand même : il n’y a pas d’anaconda ici !  Enfin, il y a 2 hommes avec moi, et quels hommes !  Ils nous ont encore préparé un feu du soir, (espoir !), qui nous permettra de faire sécher les quelques habits lavés en fin d’après-midi dans la rivière.
Les couleurs sont magnifiques ce soir sur la Selengue.  Un mongol qui travaille dans le coin se joint à nous pour l’apéro.  La tradition veut qu’avant de boire, on prenne un petit goulot de vodka, en en envoyant quelques gouttes aux 4 points cardinaux : une sorte de baptême !  Ensuite, on prend le verre offert de la main droite en se tenant le coude droit avec la main gauche.  Il existe beaucoup de rites de ce genre en Mongolie, et nous essayons de ne pas faire d’impair.  Pour Noé, c’est l’occasion de travailler la latéralité, parce que les notions de gauche et de droite ne sont pas encore bien ancrées.  Par contre, les mongols disent très peu de formule de politesse.  D’un seul coup, notre invité se lève, et puis s’en va : c’est comme ça…


Le ciel est clair ce soir, les étoiles bien visibles, la nuit va être délicieuse dans ce petit campement de fortune, et c’est vrai qu’on n’a pas froid la nuit avec cette vodka !

Le volcan Uran Togoo Uul


Tombe de général hun, vue de plus près




Bai Bulag


Guerrier mongol ramenant sa proie!

Guerrier mongol terrassé par sa proie!

1ère crevaison

Et 1ère leçon de mécanique!

Ca y est, papa, j'ai compris!

Chez le réparateur de pneus

La Selengue


Nième vodka, on ne va pas tenir les comptes non plus!

L'invité surprise




Mercredi 27 août 2014 – Lac de Khövsgöl

Question bi-quotidienne de Noé : « Combien de jours on reste encore dans ce pays ? », ou encore au réveil avec un large sourire : « Il reste encore X jours dans ce pays ! » !
Le petit hun-demi est tombé amoureux de la Mongolie apparemment…

C’est avec dextérité que nous replions duvets et tente, petit-déjeuner, vaisselle, brossage des dents, visite des troupeaux de chevaux sauvages, et un vol d’oies sauvages par-dessus les flots!  Les habitudes sont bien prises maintenant : après 8 mois de voyage, nous sommes de vrais nomades, faut dire ! 
La route est asphaltée jusqu’à Khatgal, petit village à l’entrée du lac Khövsgöl.  Nous faisons un arrêt bref à Moròn, nous ravitailler en quelques fruits et sucre pour le camp de yourtes de ce soir.  Les villes et villages sont plaisants à voir avec leurs toits de tôle colorée, vert, orange, bleu, rouge, au milieu du vert pâle des steppes de fin d’été.  Le marché ne semble pas très grand de prime abord, mais c’est l’arbre qui cache la forêt : il y a des petites échoppes dans tous les coins, des anciens landaus reconvertis en étal, de la nourriture bien sûr, mais aussi des vendeurs de plantes médicinales, dont les mongols sont friands.

Après Khatgal, c’est la piste.  Ca secoue dans tous les sens, et entre les petites marmottes qui détalent elles aussi dans tous les sens, on voit enfin les premiers yacks.  Etranges bêtes, presque chimères, avec une tête de vache, des cornes de chèvre, un manteau d’alpaga et une queue de cheval. 
Le lac Khövsgöl est appelé la « perle bleue de Mongolie ».  Il n’a vraiment rien à envier au lac Baïkal, que ce soit sur la clarté de ses eaux (a priori si pure qu’on peut la boire…), sur la beauté des montagnes le long de ses berges, ou les forêts de sapins, où nous nous promènerons en fin d’après-midi, tout en essayant d’initier Noé aux 4 points cardinaux, et à se repérer dans une forêt. 
Le camp de yourtes où nous nous posons ce soir est sur la berge est du lac.  Super bien équipé, et pourtant impression encore d’être au milieu de nulle part.  Un petit yack vient s’inviter au pas de la yourte au moment où l’école de Noé commence.  Lui ressortira vite fait, mais il n’est pas certain du tout qu’une petite marmotte ne finisse dans le lit douillet de Noé cette nuit, vu le nombre que l’on croise dans ce camp !

La vie est douce en Mongolie, loin de toute futilité, c’est un vrai retour à l’état sauvage, au bon sens du terme.  En plus, nous avons beaucoup de chance d’être accompagné de Jijgee et Bayargalat, qui sont plus que sympathiques.  Les soirées et les journées en leur compagnie sont bien agréables.  Jijgee fait le bonheur de Noé en lui montrant des numéros de cirque, et Bayargalat nous rappelle trop notre tonton Robert.  Que du bonheur (surtout après la douche bien chaude) !

A l'école de Noé...

On se prépare pour l'Hawaiki Nui!

Surtout papa, et Noé a déjà le sourire du vainqueur!


Petite ballade autour du lac Khövsgöl




Rares les chameaux au nord de la Mongolie

Aigles de Mongolie

Pharmacie mongole

Le lac Khövsgöl


Les petites marmottes (il y en a partout!)
Jeudi 28 août 2014 – En mode nomade au lac Khövsgöl

Dès que le soleil disparaît le soir, il fait un froid de canard.  Mais dès qu’on allume le poêle dans la yourte, c’est pire qu’un sauna ! Nous avons vite fait d’éteindre le chauffage central hier soir, après 10 minutes seulement, d’autant plus que les yourtes protègent vraiment bien contre le froid en elles-mêmes.  Par contre, petit délice ce matin quand une personne du camp est venue à l’aube nous rallumer le fameux poêle pour que nous ayons un réveil bien au chaud : hummmm… !

Après un court entraînement à l’arc sur peau puis à la chasse aux marmottes (pas de trophée pour aujourd’hui : ouf !), il est temps de préparer les charrettes.  Nous partons 2 jours en randonnée toujours à l’est du lac Khövsgöl, avec un nomade éleveur, Poldò, et son fils.  Seul Jijgee nous accompagne : Bayargalat, le bienheureux, a 2 jours pour se reposer tranquillement (repos mérité par ailleurs, parce que conduire en Mongolie, c’est sportif quand même !).
2 charrettes ne seront pas de trop pour transporter le matériel nécessaire à la construction de la yourte pour le campement de ce soir, sacs, nourriture, etc…  Surtout ces charrettes seront menées tambour battant par les 2 énormes résultats d’un croisement entre une vache et un yack : des bestiaux impressionnants, pas du tout chimériques !  Et puis, nous voilà montés sur les chevaux mongols pour 2 heures environ avant d’élire notre campement.  Les chevaux mongols, comme ceux des Marquises, ne sont pas très grands, mais plus musclés et un peu plus nerveux, dans le bon sens du terme : ce ne sont pas des mulets qui se suivent à la queue leu leu en sorte.  Comme dira Noé : « Elles sont bien ces selles, c’est pas comme à Ua Huka ! ».  Effectivement, petit rembourrage pour les fessiers sur une selle en bois, mais là aussi nous serons contents, car la plupart du temps les chevaux ne marchent pas, mais trottinent allègrement. 
Nous traversons la steppe, la forêt, des champs d’edelweiss, et enfin arrivons aux berges est du lac.  Presque pas une yourte à l’horizon, par contre un ciel gris et menaçant.  Première étape : monter la yourte.  C’est comme les Lego ou les Kappla en quelque sorte, mais le résumé sera en images.  Là où nous sommes bien étonnés, c’est qu’en moins d’une heure, le tout est déplié, et même le poêle est installé !  Le seul hic sera d’avoir sorti la yourte d’été sans le petit toit central tout en haut, ce qui fait que nous voilà, Jean-Pierre et moi, à finir le tout, tant bien que mal, aux ponchos quand la pluie arrive !
Si la yourte est facile à monter, il faut par contre être beaucoup plus attentif aux règles de bienséance dans celle-ci.  On entre toujours pied droit en premier, et on ne stationne pas sur le seuil.  Ensuite, on pénètre toujours en circulant dans le sens des aiguilles d’une montre, donc on part sur la gauche, et on sort de la yourte à reculons si une personne souhaite entrer en même temps (ce qui est plutôt difficile vu la taille de la porte).  Règle princeps : ne rien faire passer entre les 2 poteaux centraux de la yourte, sacrilège ! Et ne rien jeter dans le feu, mais cette coutume a plutôt tendance à se perdre.  Quand on visite un monastère bouddhiste, c’est la même chose.

Une courte accalmie nous permettra de repartir en ballade à cheval.  Le lac est d’une pure beauté, ses eaux changeantes sous la lumière, dégradés de gris, bleu du lagon.  Au fait, c’est confirmé, les mongols boivent l’eau du lac.  Nous, on a oublié les bouteilles d’eau, donc on la fera bouillir : on préfère quand même !  Le seul inconvénient, c’est qu’avec tout ce thé quand il va falloir aller vider la vessie au milieu de la nuit sous la pluie, on fera moins les malins…!
Le retour au campement se fera sous une pluie de folie, les éclairs sont à portée de cheval, et nous arriverons à la yourte trempés jusqu’au slip !  La bonne surprise, c’est encore une fois le poêle, qui est allumé et va bien nous réchauffer ; on n’a juste pas encore trouvé de solution étanche pour notre toit, mais finalement, nous serons chanceux : la pluie s’arrêtera dans la nuit, les bourrasques de vent viendront nous chatouiller sous les duvets, d’où nul ne bouge.

On pense qu’il n’y a jamais personne aux alentours dans ces steppes, mais nous ne serons pas peu surpris d’entendre toquer à la porte de la yourte vers 20h30 – 21h : c’est Robert (c’est décidé, notre chauffeur est rebaptisé !) qui vient nous voir avec 2 amis, chauffeur et guide, qui sont arrivés au camp de yourtes aujourd’hui, et qui s’inquiétait pour nous, face à la pluie torrentielle.  L’occasion d’ouvrir une bouteille de vodka à partager, mais nos invités avaient visiblement déjà fêté leurs retrouvailles.  Robert nous sauve surtout avec 2 bouteilles d’eau potable qui étaient dans le petit camion.  Ils sont repartis comme ils étaient venus, en espérant que la camionnette russe dans les steppes trempées au milieu de la nuit était sur pilote automatique !


Le lac Khövsghöl

La cible d'entraînement 

Le mongol en herbe

Maintenant, au tour des marmottes de charger!

Départ en randonnée, les yacks sont prêts

La yourte est chargée
La chevauchée fantastique

Montage de la yourte

Noé prend la porte!




Les 2 piliers centraux

Ca avance...






C'est prêt, on sera à l'abri, enfin presque...

Un chat sur un toit brûlant ou test de solidité

Installation du poêle


C'est prêt, on peut manger




Chinggis Khon

Vendredi 29 août 2014 – Les Tsaatan du lac Khövsgöl

Le feu allumé au petit matin nous permet un réveil en douceur dans ce froid mongol.  Le soleil pointe le bout de son nez, mais le vent est glacial en cette fin d’été. 
Après le petit-déjeuner mi-dehors, mi-dans la yourte, nous démontons la yourte : ça va encore plus vite que de la monter! Tout est chargé sur la charrette, et le fils de Poldò reconduit l’attelage au camp de yourtes, pendant que nous prenons le chemin du retour via la forêt de sapins pour aller voir un éleveur de rennes, de la tribu des Tsaatan.  Les Tsaatan ne vivent pas dans des yourtes, mais dans des tipis.  Nous sommes accueillis avec un bol de lait de renne chaud par une femme et son petit garçon de 4 ans, qui s’empressera d’aller jouer à la balle avec Noé.  Le papa arrive ensuite, et nous restons un moment avec cette famille, à discuter, regarder les objets sculptés en bois de rennes, découvrir les pierres qu’ils vont chercher dans les rivières ou les montagnes, dont le jade blanc et le jade vert.  Les Tsaatan sont peu nombreux de nos jours, et vivent au rythme de leurs troupeaux de rennes.  Ce sont également des chasseurs, même si cela n’est pas forcément autorisé par la loi : difficile de faire plier un mode de vie datant de plusieurs centaines d’années.  Le petit garçon n’est pas encore scolarisé.  Mais quand il le sera, à 6 ans, il ira au village avec sa maman, ou chez ses grand-parents.  A l’intérieur du tipi, sont rangés quelques cahiers de coloriage et des petites voitures.  Nous leur laisserons en cadeau un parfum pour madame (qui fera aussi très plaisir à monsieur !), et la balle de tennis, ce qui ravit tout le monde.  Le plus ravi et le plus fier sera néanmoins Noé, qui repart avec un pendentif en bois de renne autour du cou, offert par le papa Tsaatan.  Est-ce que les copains à son école vont le croire quand il leur montrera son trophée ? Est-ce qu’il pourra le mettre au mur dans sa chambre à Tahiti ?  Autant de rêves émerveillés suscités par ce petit bout d’os (car on dit « bois de rennes », mais ce sont des os avec de la moelle osseuse à l’intérieur- on sent très bien le sang chaud quand on touche les bois des rennes).  Nous quittons notre famille Tsaatan de droite, et peut-être verrons nous demain des Tsaatan de gauche.  Rien à voir avec une formation politique quelconque, mais avec leur position géographique par rapport au lac Khövsgöl.

Nous remontons sur nos destriers.  Noé et papa affronteront avec bravoure les essaims d’abeilles ; Noé fera des sauts à cheval au-dessus des troncs d’arbre jonchant la forêt.  A t’il mérité le qualificatif de « vrai aventurier » ? Assurément !

Il n’y aura pas eu d’école ces 2 derniers jours pour Noé, si ce n’est celle de la vie.  Parce que faire 4 heures de cheval par jour, affronter un orage dans la steppe mongole, monter et démonter une yourte, se battre contre les abeilles, promener des rennes et sculpter des petits objets en bois, c’était déjà beaucoup de choses inestimables à apprendre, non ?...

Petit pain grillé du matin

Après le montage, le démontage...

Fastoche, ça va plus vite!




Et voilà! il n'y a plus rien!





Petits potes nomades


Allez les yacks, on rentre!

Chez les Tsaatan

Eleveurs de rennes, bien sûr



Calumet de la paix

Encore un nouveau pote!


Samedi 30 août 2014 – Les berges de l’Ider

Tout le monde s’est bien gelé cette nuit une fois le feu du poêle éteint !  Noé s’est réveillé au petit matin, frigorifié, tout découvert de ses couettes, tellement il s’était tourné et retourné. Heureusement, il y avait maman, rebaptisée le « chauffage central » !  Dehors, une fine couche blanche couvre les herbes, et en quittant le lac Khövsgöl, nous traversons quelques guets où les flaques d’eau sont aussi recouvertes d’une pellicule de gel.  Nous ne sommes donc pas que des frileux et mythomanes tahitiens !

Un peu avant Moròn, nous nous arrêtons dans un petit espace protégé où se trouve des pierres de rennes : Uushigiin Uver.  Celles-ci datent de l’âge de bronze, et sont des pierres, toutes orientées vers le nord (important dans la symbolique mongole – la porte des yourtes s’ouvre sur le nord, par exemple), et sont sculptés dessus des rennes qui volent, des ibex, des chasseurs, un visage même sur l’une d’entre elles.  Ces pierres ont été abîmées non seulement pas le temps, mais surtout pas l’homme.  On pensait que cet endroit était un lieu de sépultures, et les hommes ont creusés et détériorés les pierres pensant trouver des trésors enfouis… Il n’y en avait pas.  Les chercheurs pensent qu’ils y avaient des tombes effectivement, mais que c’était surtout un lieu de sacrifices (humains ? a priori, non, les mongols ne sont pas décrits comme étant des cannibales…) et de culte.  A qui ? à quoi ? Le chamanisme peut-être a les réponses, ou un début…

A Moròn, nous faisons un bon ravitaillement de nourriture et vodka (hier soir, on n’a pas bu, on se dit que c’est peut-être pour ça qu’on a eu si froid !), car nous partons camper sous tente pour 3 nuits dans la nature.  Pique-nique au bord d’une rivière, où des poissons grouillent (un groupe de pêcheurs sur un pont en aura même un d’un mètre environ !), et les aigles nichant dans la montagne guettent quelques restes de poulet.

La route est longue aujourd’hui, la piste caillouteuse, les cols des montagnes jusqu’à 2000 mètres.  Mais surtout, nous serons attardés par un arrêt intempestif : ça fume dans le moteur !!! Bilan lésionnel : plus d’eau dans le radiateur, une jolie fissure désignée responsable de la fuite.  Pas de problème : une réparation de fortune se fait au bord de la piste.  Les voitures ne partent pas sans un équipement pouvant parer à tout incident en Mongolie, c’est quasi-inévitable, et surtout il n’y a pas grand-chose ni grand-monde à l’horizon…  C’est au coucher du soleil que nous arriverons au campement près du lac de Zuun Nuur.  On n’a pas tellement le temps d’admirer le paysage : il faut monter la tente, préparer le feu, chauffer la ratatouille… Faut pas croire, y en a du boulot en mode nomade !  Et surtout, nous nous faisons rattraper par le froid, les derniers rayons du soleil disparaissant derrière le lac.  Tels Marie-Madeleine et Saint-Jean-le-Baptiste, nous nous sacrifions, Jean-Pierre et moi, pour aller faire la vaisselle dans l’eau glaciale du lac.  Non, je ne laverai pas les cheveux de Jean-Pierre avec mes pieds : baptiser nos mains dans le lac nous ouvrira bien déjà les clés du paradis! 


Un habitant d’une yourte voisine arrive en moto, probablement alerté par les flammes de notre feu de joie.  « Qu’est-ce qu’il vient faire le monsieur ? » demande Noé.  « Bah, ici, c’est comme ça.  Les gens sont des nomades, alors ils s’arrêtent sur leur chemin, s’assoient à notre table ; on leur offre à manger, à boire, et puis ils reprennent leur chemin, tout simplement. »  En voyant ce monsieur assis, là, avec nous, nous réalisons à quel point nous avons oublié ces règles d’hospitalité, et ce qu’on appelle « la place du pauvre » est devenue réduite à une simple expression.  Puisse Noé se rappeler ces instants, l’hospitalité, la charité, et maintenir sa porte ouverte, celle de la maison, celle de son esprit.


Chapeau chou!

Pierre de rennes

Pierre de rennes

Pierre de rennes (pour ceux qui n'ont pas suivi!)

Pause déjeuner

Eux aussi surveillent le casse-croûte

Vase d'expansion fissuré: 2ème panne!



Lac de Zuun Nuur



3ème réparation: faut que ça tienne!

Cherchez l'écureuil


Dimanche 31 août 2014 – Therkhiin Tsagaan Nuur, le lac blanc

La réparation d’hier du radiateur de la voiture n’aura pas tenu.  Aussi, la première mission de la journée est la consolidation de la fissure  avec du plastique chauffé : pari en jeu, tiendra jusqu’à Tsetserleg ou tiendra pas ?...
Nous voilà repartis pour une grande journée de route : les distances ne sont pas tellement grandes, une centaine de kilomètres au plus, mais la piste est difficile.  La récompense offerte à nos yeux par les paysages, les troupeaux de bétail, les aigles, les écureuils, ne nous lasse pas.  Nous nous arrêtons déjeuner dans un petit village, en effervescence : c’est dimanche, et surtout la veille de la rentrée scolaire.  Des marchands de vêtements, chaussures et autres affaires d’enfants sont à tous les coins de rue.  Les ventes de viande de cheval et de yack se font devant les coffres de voiture.  Nous n’avons pas encore goûté cette dernière, mais ce matin, c’était du beurre de yack sur les tartines : franchement, on n’a pas trop senti la différence avec le beurre de vache.

Et puis, en fin d’après-midi, le lac blanc.  D’où vient cette appellation ? Aucune idée, l’hiver a peut-être sa réponse.  En ces derniers jours d’été, sous la lumière du soleil, il étincelle, glacis, et surtout les montagnes qui l’environnent le rendent encore plus beau.  Ce lac résulte des écoulements de laves du mont Khorgo, qui bouchèrent la rivière Terkh au nord et au sud, formant un barrage naturel.  Des pics de lave se dressent sur les rives du lac, et des coulées sont visibles à travers ses eaux claires.  Robert a des amis, qu’il n’a pas vu depuis 2 ans, tenant un camp de yourtes près du lac.  C’est à l’arrière de leur jardin que nous monterons les tentes.  Très gentiment, ce couple d’amis nous laisse disposer de leurs toilettes et douche, de leur cuisine, et même du chauffage sous la yourte avant le dodo : l’hospitalité mongole… Nous goûterons même un peu de fromage séché sucré : surprenant et très bon, à vrai dire. 


Ce que nous avions pris un peu plus tôt pour des pics de lave sont en réalité des empilements de pierres de lave, probablement un rite chamanique.  Très courageusement, Noé traverse un troupeau de yacks, et laissera sa marque sur le site en empilant quelques pierres volcaniques.


Scène de village, un dimanche


Toilettes publiques: je garde la porte, maman fait pipi!
Un steak de cheval?...
L'école (presque) buissonnière

La cour de récré



Stupas de lave sur les bords du lac blanc

???

Le lac blanc

Shinkhuu, le mongol blanc





Le lac blanc

Du thé toujours prêt

Fromage de chèvre sucré

Seuls au monde

Jeu de pierres, jeu de vil air



Lundi 1er septembre 2014 – Le mont Khorgo

Alors que c’est la rentrée des classes en Mongolie, Noé continue son école du nomadisme.  C’est le bruit des mâchoires d’un yack broutant allègrement à côté de notre tente, qui nous réveillera ce matin.  Il a fait encore bien froid cette nuit, et le feu sous la yourte est le bienvenu au moment du petit-déjeuner.  Bien couverts, nous partons pour une randonnée : l’ascension du mont Khorgo, celui-là même dont l’éruption est à l’origine du lac blanc.  Après une petite montagne, c’est un véritable champ de pierres de laves que nous avons à traverser : pas facile de marcher là-dedans, mais la bonne récompense sont les petites myrtilles sauvages cueillies et goûtées sur place, dont les traces se verront encore sur les doigts et autour des lèvres de Noé un bon moment.  En marchant le long du cratère, nous nous disons que cette année aura été aussi l’année des volcans pour Noé : il en aura ascensionné quelques-uns, et des plus fameux, et promené ses petits pas le long de quelques cratères aussi.  Ce cratère-là est d’ailleurs bien impressionnant, et nul n’ose, ou rarement, s’y aventurer.  Par contre, d’en-haut, on voit très bien la rivière Terkh dont le cours a été arrêté par les coulées de lave.  Cette vallée-là aussi est bien jolie.  Nous aurons marché bien 4 heures, et grande nouvelle : Noé est prêt pour la montée de l’Aorai à Tahiti, le passage du Diable compris !

A notre retour, Robert nous a préparé un repas de roi, enfin… de khan : soupe de champignon, nouilles chinoises aux petits légumes croquants, et beignets en dessert.  Il est plein de ressources notre chauffeur ! Il est surtout très surprenant.  A la retraite, c’est un ancien ingénieur travaillant dans l’automobile (ça nous rassure, même s’il a déjà fait ses preuves avec le radiateur !), qui a 5 enfants, dont une fille étudiante en technologie en Allemagne, et une autre en 5ème année de médecine en Chine.  Bien sûr, nous lui disons que si sa fille veut venir un jour à Tahiti, qu’elle serait notre invitée avec un immense plaisir.  Comme quoi, sous des airs de bonhommie…, et comme dit Noé : « Tu sais bien qu’il ne faut jamais se fier aux apparences ! ».

L’après-midi est tranquille.  Nous restons sur les lieux de notre campement.  Une bonne douche à l’ancienne nous fait le plus grand bien ; on lave notre linge comme on peut ; et Noé fait son heure d’école.  Pendant ce temps, un ragout de marmottes fraîchement chassées est en train de mijoter sur le poêle, aux pierres chaudes.  Nous aurons droit à goûter ce mets prisé des mongols.  Elles sont toutes petites, ces marmottes, mais elles sont bien grasses !  Après, pour le goût, c’est un peu comme du bœuf, il faut juste passer le cap psychologique…

Petit fou rire masqué après la classe : muni d’une plume de milan noir, d’une bouteille où il a confectionné de l’encre avec de la peinture noire et un peu d’eau, son cahier sous le bras, notre explorateur de le Noé s’en va dans la steppe avec ces mots « Je m’éloigne un peu, maman… mais pas trop quand même, ne t’inquiète pas… je vais explorer les fleurs, les cailloux,… et je vais tout noter dans mon cahier… ».  Quelle allure ! Quel aventurier !

Familles de nomades


Mais que cherchent-ils?

Réponse: des myrtilles, bien sûr!

Champ de lave: dure, dure, la traversée

Cratère du mont Khorgo






Ragoût de marmottes: qui en veut?...

L'exploreur


Scène de la vie quotidienne

Quelques chachliks!

Mardi 2 septembre 2014 – Tsetserleg et les sources chaudes de Tsenkher

Ce n’est pas un yack auquel nous aurons droit au réveil, mais un berger des temps modernes, qui, juché sur sa mobylette chinoise, tente de rassembler son troupeau de moutons à grands coups de klaxons !  Allez, c’est l’heure, on plie bagages !  Cela nous a fait du bien de nous poser un peu tranquillement hier.  Les routes et les trajets sont parfois éprouvants, et encore une fois, saluons la bravoure de Noé, qui encaisse tout ça très facilement.

Tsetserleg est la ville principale de la région nommée « la petite Suisse de Mongolie ».    Autant nous avons traversé auparavant des villages quasi-fantômes, dignes des plus grands westerns, autant ça bouge à Tsetserleg en ce mardi midi.  Juste après déjeuner, nous allons visiter le musée de l’aymag, c’est-à-dire de la région, qui se trouve dans un ancien monastère.  C’est une sorte de petit musée de l’histoire comme celui que nous avions visité à Oulan-Bator.  Mais ce qui a attiré le plus notre attention, en-dehors des osselets que Noé découvre, c’est un monsieur en train de s’entraîner à un jeu mongol, où il s’agit de viser un morceau d’os avec un autre, à la force de son majeur.  Apparemment, ce jeu est très pratiqué lors du naadam, les jours de fête nationale en juillet, avec les compétitions de tirs à l’arc, de lutte mongole et de courses de chevaux.  Quand les concurrents sont à égalité, le morceau d’os devient de plus en plus petit, et au cours de la finale, c’est une pièce de monnaie qu’il faut viser !  On se rend vite compte que cela demande de la dextérité et de la précision, en s’y essayant.  Avant d’être un jeu, c’était une technique de combat au temps de Chinggis Khan.  Les cavaliers, lancés au grand galop, avaient tous cette arme accrochée sur leurs selles, qu’ils dégainaient à l’encontre de poursuivants trop tenaces.  Cela ne tuait pas, mais faisait très mal et permettait de désarçonner les plus coriaces.

A 25 km de Tsetserleg, se trouvent les sources chaudes de Tsenkher.  La piste est rude, et il nous faut environ une heure pour rejoindre notre camp de yourtes.  Mais une fois arrivés, quel bonheur de plonger dans la piscine d’eau à 40°C, et de s’octroyer le plaisir d’un petit massage !  Après dîner (où, enfin, nous avons goûté l’airag, le lait de jument fermenté, qui ressemble à du petit lait picotant sur la langue), à la nuit tombée, à quelques 500 mètres du camp, nous allons voir les sources.  La fumée nous guide de loin : l’eau sort à presque 100°C de dessous les roches, et une discrète odeur soufrée se fait sentir, celle-là même que nous avions perçue sous l’eau de la douche un peu plus tôt.  Nous prenons le chemin du retour à travers un petit bout de forêt, tentant d’éviter les cours d’eau et les ponts faits de troncs d’arbres, avant que Noé ne nous revienne tout mouillé, et espérant aussi ne pas croiser un loup ou un ours !  Mais pas d’inquiétude, le petit père a des techniques de karatéka si on se fait attaquer !

Station essence: pourquoi faire compliqué?


Le musée de l'aymag de Tsetserleg

Outre à lait ou airag

Méchant

Jeu de précision


Enfin un bain chaud!

Très chaud!

Très, très chaud! Enfin, pas dehors!


 Mercredi 3 septembre 2014 – Monastère de Tuvkhun et la vallée d’Orkhon


Nous profitons une dernière fois des sources chaudes avant de partir de Tsenkher pour nous arrêter en bas de la montagne Undur Shireet.  Nous grimpons pendant une heure et demie pour arriver au pic de la montagne, où un monastère a été érigé en 1654 par Zanabazar.  Ce dernier était le premier bouddha mongol, et aussi un artiste, ayant dessiné le Soyombo, le symbole que l’on trouve sur le drapeau mongol.  Sur le chemin, nous tentons d’expliquer à Noé qui est Bouddha, en lui disant que c’est en quelque sorte, le nom du Dieu prié ici en Mongolie.  La réflexion du bonhomme était prévisible et imparable : « Pourquoi on l’appelle Bouddha ? C’est parce qu’il boude tout le temps ?... ».  Euh…, non…, mais, heureusement pour nous, l’esprit du rapporteur va plus vite parfois que nos réponses, et il change de sujet aussi soudainement, nous évitant bien des empêtrements d’explications !

Des cérémonies viennent de débuter au monastère pour 4 jours.  Durant leurs prières, les moines bouddhistes boivent de l’airag, qui est tout de même alcoolisé, en quantité non négligeable, à tel point qu’ils doivent finir la journée en sur-méditation ! Même les plus jeunes moines s’en délectent.  Seule maman ne grimpera pas tout en haut de la montagne, mais grand bien lui en a pris : le site est sacré et interdit aux femmes de toute façon.  La vue du haut de Undur Shireet, qui culmine à un peu plus de 2 300m d’altitude, est fantastique : on a l’impression que le paysage de steppes et de forêts est infini.  Où s’arrête ce pays ?  Le temps, d’ailleurs, rejoint l’espace ici : il s’étire tant qu’on a le sentiment qu’il s’est arrêté pour le plus grand plaisir de ses voyageurs.

Robert nous a préparé un bon plat de spaghettis, que l’on va dévorer à notre retour de promenade.  Une vraie perle, ce Robert !  Puis, nous reprenons la piste, et atteignons la vallée de l’Orkhon, du nom d’une rivière qui y circule et rejoint la Selengue.  Nous logeons chez des nomades pour 2 nuits, un éleveur de moutons, chèvres, chevaux.  La porte de sa yourte nous est ouverte avec pour accueil un verre de thé au lait salé, puis un bol d’airag.  Evidemment, on ne peut pas refuser, et même Noé nous fera honneur, surtout à nos hôtes, en goûtant à tout.  Maman sera la seule à tester la crème de yack : du pur beurre qui laisse au bord de l’écoeurement !  Une peau de chèvre et sa tête non loin de là sont en train de sécher, pendus au toit de la yourte ; un grand tonneau d’airag et de beurre de yack toujours prêts au coin du poêle.  Mais les yourtes se modernisent aussi : un petit panneau solaire est dressé à l’extérieur ainsi qu’une parabole, une batterie chinoise, un écran de télévision, un lave-linge mais dont la fonction doit être détournée...  Après un bon bain revigorant dans la rivière, il est l’heure de faire un peu de cahier de lecture et de mathématiques, en attendant l’heure de la traite des juments.  Un 4x4 s’arrête devant notre école improvisée : un nombre de jeunes femmes incalculable vu la taille de la voiture en descend.  Ce sont des personnes travaillant dans l’hôpital le plus proche, une petite ville de 10 000 habitants, dont 5 médecins.  Ceux-ci se rendent dans les yourtes, chez les nomades, afin de vacciner les enfants, et faire du dépistage et de la prévention.  Nous discutons rapidement avec une des médecins, car elle a beaucoup de travail, mais elle nous explique que les études de médecine durent 5 ans, et ensuite, chacun doit faire 2 ans de pratique dans les hôpitaux périphériques, avant de pouvoir retourner à Oulan-Bator et entamer une spécialisation qui dure 2 autres années environ.  Le petit 4x4 avec son gyrophare repart ensuite vers un autre camp de yourtes.  Et puis, c’est l’heure.  Le soleil se couche.  Notre éleveur enfourche sa mobylette chinoise et rassemble le troupeau de chevaux près du camp.  Il en possède une cinquantaine environ.  5 petits poulains, restés attachés près des yourtes durant la journée, sont libérés un à un, et mis au pis de leur jument-maman pour quelques tétées afin d’amorcer la montée de lait.  Puis la femme de notre éleveur prend place et trait quelques litres du lait de jument, qui sera utilisé pour la fabrication de l’airag notamment.  Ensuite, les poulains sont libérés pour la nuit, et se mettent à galoper frénétiquement auprès de leurs mères.  Seul un poulain tout chétif restera près de la yourte, isolé.  Celui-ci a malheureusement perdu sa mère juste après sa naissance en mai, alors que la neige était encore bien présente dans les steppes.  Il est désormais alimenté encore au biberon avec le lait d’autres juments, mais reste très maigre et n’a pas encore perdu ses poils de bébé.  Mais le froid tombe avec les derniers rayons du soleil, et nous sommes invités sous la yourte principale, celle de nos hôtes pour le dîner : une excellente soupe de chou, pommes de terre, carottes et pâtes fraîches, dont la recette de fabrication nous sera dévoilée demain, nous attend.  Notre jeune couple de nomades a 2 enfants : une petite fille de 3 ans et un petit garçon de 9 mois, qui commence à babiller.  La maman allaite encore son fils, et refuse tout alcool, ce qui n’est pas pour nous surprendre positivement.  Nous prenons alors une leçon d’allaitement maternel mongol : lorsqu’une femme accouche, et qu’elle n’a pas de colostrum, on donne à téter au nouveau-né le gras de la queue d’un mouton, préalablement chauffée.  Ensuite, cette queue de mouton sera donnée quasiment tout le temps au bébé à téter, une sorte de tétine en somme, qui donne très tôt le goût de la viande aux petits mongols.  Parce que la viande, ils aiment ça ici, et en mangent plus que nécessaire.  Pendant le temps du repas, nous observons cette petite famille.  Le père s’occupe vraiment beaucoup de ses enfants, prend le petit garçon dans les bras, joue avec la petite fille.  Il faut dire que la mère n’arrête pas une minute, prépare le repas du soir, bat le lait de jument fermentant dans son tonneau, met de l’eau à chauffer pour le thé, sort chercher de l’eau, rebat le lait de jument, lave le linge…  Quand on voit les gens vivre ainsi, posant simplement et efficacement chacun de leurs gestes quotidiens, si différemment de notre mode de vie où l’on est toujours pressé de tout et où tout pose questions, on se demande finalement ce que l’on a à chercher de plus dans la vie : ils sont ensemble, ils travaillent dur, ils ont l’air heureux... comme les Shuars en Amazonie, et comme nous avons apprécié cette manière de vivre.

Le bois est coupé (merci Jean-Pierre !, qui a gagné ses galons auprès de Noé, qui veut être fort comme papa quand il sera grand), le poêle est allumé, il est l’heure d’aller se coucher.  Noé s’endort comme un nouveau-né, et c’est vrai qu’un nouveau petit garçon est né ce soir.  Il s’appelle Shinkhuu (prononcez « chinehou »).  Ca veut dire « nouveau garçon » en mongol, et c’est le nom dont Robert l’a baptisé au dîner, affirmant que le jour où il aura un petit-fils, il le nommera ainsi, un prénom apparemment rarement entendu en Mongolie.  Le collier des Tsaatan autour du cou, que de chemin parcouru pour le shérif d’Erima, qui poursuit son voyage initiatique dans des rêves qui deviennent de plus en plus réalité.





Pas machistes, les bouddhistes

Monastère de Tuvkhun



Le Soyombo, emblème mongol





Jean-Pierre, c'est bon, on t'a reconnu!

La vallée de l'Orkhon

Pouliche à adopter

Chez les nomades de la vallée de l'Orkhon

Salle de bain de la vallée d'Orkhon



Nouvelle école de Noé

Blanche-Neige, où es-tu?


Traite des juments


Jeudi 4 septembre 2014 – Les chutes de l’Orkhon

La vallée de l’Orkhon est magnifique, il n’y a pas d’autres termes, et là encore, nous laisserons les images parler.  Nous sommes allés à cheval ce matin voir les chutes de l’Orkhon : très jolies, elles aussi.  La rivière est belle et claire, mais plus froide que le lac Baïkal : Noé se trempera, mais vite fait ! Le retour sera au grand galop pour Jijgee et Jean-Pierre, qui finira sur le cou du cheval, la selle s’étant défaite ; Noé et moi, on a eu notre compte de cheval… 

Quelle surprise de voir arriver un 4x4 dans l’après-midi, avec un tatouage sur le bras d’un touriste qui rapidement nous dit quelque chose, et le « Hinano Tahiti » sur le T-shirt du second levant toute incertitude : des compatriotes tahitiens !  Nous passerons une bien agréable soirée avec eux, dégustant une bonne bouteille de Bordeaux au fond des steppes qu’ils avaient apportées dans leurs bagages, et un puros Cohiba en provenance directe de Cuba, avec un barbecue mongol.  Ce dernier se fait en mettant de la viande, de la chèvre en l’occurrence, dans une bassine avec un peu d’eau, et ensuite des pierres chaudes sont ajoutées : recouvrez le tout de façon assez hermétique, et laissez prendre. En fait, il s’agit là d’une espèce de cuisson à la vapeur, rappelant le « mfour » marocain.  C’est bien la meilleure chèvre que nous ayons goûtée jusqu’à présent ! Même aux Marquises, nous n’avons jamais dégusté une viande si tendre.  La soirée est bien joyeuse avec ce groupe, et nous n’avons pas eu froid cette nuit, c’est certain!  Faut dire que vin et vodka font un mélange étonnamment détonnant !

Une nouvelle fiancée

La salle de bain est occupée!


Les chutes de l'Orkhon

Le long de l'Orkhon


Bon allez, je me lance!

Distillerie de vodka de lait: ça arrache!

Barbecue mongol
Vendredi 5 septembre 2014 – Kharkhorin et le monastère d’Erdene Zuu

Les nuages rejoignent les steppes ce matin en un dégradé de gris.  Le temps est changeant en Mongolie.  Hier, transpirant sous le soleil, à se baigner dans l’Orkhon ; ce matin, pulls et bonnets sous la grisaille et la bruine.  Nous quittons nos voisins tahitiens, et repartons en direction de Kharkhorin.  C’était l’ancienne capitale de Mongolie, celle sous Chingghis Khan.  Il n’en reste plus rien.  Sur les ruines de cette ancienne cité a été construit le monastère de Erdene Zuu au 16ème siècle, entourée d’une enceinte de 108 stupas, arborant toutes le Soyombo.  Les russes étant passé par là, il ne reste plus que 4 temples et une stupa d’or, alors qu’il y en avait plus de soixante, et un millier de moines y résidait.  Quelques moines sont désormais autorisés depuis 1990 à exercer à nouveau leurs prières, parfois contre une rétribution monétaire : hé oui, c’est désolant, mais toutes les religions ont des velléités mercantiles…  Non loin du monastère, il y a un petit musée, où les fruits des recherches sur Kharkhorin menées par une équipe germano-mongole sont exposés, de l’époque préhistorique à Chinggis Khan.  Il n’est pas très grand, mais est assez intéressant, notamment la maquette de l’ancienne capitale au 13ème siècle, avec son camp de yourtes, son quartier chinois, un quartier musulman avec des mosquées, et même une église catholique.  La tolérance religieuse était de mise sous le grand Khan, ce que l’on n’aurait peut-être pas soupçonné…  Il paraît qu’au milieu du palais de Chinggis Khan, il y avait une fontaine en argent, surmontée d’un ange soufflant dans une trompette, qui versait dans 4 bassins, de la vodka, de l’airag, du lait et de l’eau.  Aucune trace n’en a été retrouvée, mais elle est décrite par de nombreux voyageurs.

Nous étions sensés monter la tente un peu après Kharkhorin pour la nuit près de l’Orkhon, mais finalement, sous l’impulsion de Robert et du mauvais temps, nous prenons un peu d’avance sur la longue route qui nous attendait demain.  C’est en fin d’après-midi que nous trouvons un relais-yourte pour routiers, où nous pourrons passer la nuit, bien au chaud, ce qui n’est pas pour nous déplaire.  La journée a été fatigante : on n’est plus habitué à veiller !


L'aigle et le faucon?

Dans le petit trou de la lorgnette

Monastère de Kharkhorin, capitale de Chinggis Khan


Monastère d'Erdene Zuu, typiquement tibétain


Samedi 6 septembre 2014 – Le monastère d’Ongiin

La nuit n’a finalement pas été de tout repos ! Quel raffut sous cette yourte autoroutière !  Les hommes du village ou de passage n’ont pas arrêté de toquer à la porte de la yourte, pour une bouteille de vodka ou un paquet de cigarettes.  Même la tenancière des lieux n’en pouvait plus : à chaque fois, elle se lève, allume la lumière et sert les clients nocturnes.  Le dernier client s’est cassé le pied ou la jambe, et voulait une bouteille de vodka pour lutter contre la douleur le temps d’aller au poste de soins le plus proche.  Apparemment, ce n’est pas toutes les nuits comme ça ; c’est comme les gardes en somme : quitte ou double !

Nous repartons au petit matin.  Seul Noé n’a pas bronché malgré l’agitation de la nuit, et est bien reposé !  Notre Robert trace sur la piste : nous avions presque 300 km à parcourir aujourd’hui, et nous arriverons vers midi au camp de yourtes au pied du monastère d’Ongiin, ce qui était totalement inespéré ! Le monastère d’Ongiin a été construit au 18ème siècle, en briques et pisé, et il n’en reste que des ruines, celles du temps et celles liées à leur destruction par les russes.  Nous commençons à entrer dans le désert de Gobi, le plus grand désert du monde, et l’atmosphère a effectivement changé un peu.  Des steppes, nous passons aux collines de pierres et de sable, les troupeaux de bétail et chevaux ont disparu, l’eau commence à se faire plus rare, et les températures se rehaussent. 

« Est-ce que mes copains vont aimer quand ils vont voir mon dessin du territoire de Genghis Khan ? » - « Euh…oui…enfin, ce n’est pas certain qu’ils connaissent Genghis Khan, il faudra leur expliquer qui c’est. »
Et là, les parents de Noé prennent conscience d’une chose importante.  Inquiets que nous sommes sur son niveau scolaire évidemment, nous réalisons sur cette seule petite question posée dans la voiture ce que, en maintenant un peu plus de 8 mois de voyage, cette petite tête a absorbé en termes de débrouillardise, culture générale et ouverture sur le monde.  Qui, à 6 ans, connaît l’histoire des Incas, de Genghis Khan, Marco Polo et la route de la soie, sans parler de la diversité religieuse, animale, culinaire, et simplement humaine déjà tâtonnée ?...  Nous, parents de Noé, au même âge, certainement pas, ou nous n’en avons pas souvenir.  Côté Noé, même s’il râle souvent, il commence à se rendre compte qu’avoir une maîtresse pour lui tout seul et un prof de gym et de sciences, c’est du luxe, et déjà il se dit en rigolant : « Quand je vais aller au CP, je vais dire je veux refaire l’école avec maman et papa, ou quand est-ce qu’on refait le tour du monde ? hein, maman ? ça, c’est sûr ! ».

Somewhere, over the rainbow

You know what: I'm happy!

Me too!

Noé a sauté, mais on l'a loupé!

La rivière Ongiin: arrivée dans le Gobi



Monastère d'Ongiin, après passage russe






Dimanche 7 septembre 2014 – A la recherche des œufs de dinosaures aux falaises de Bayanzag

Quelle bonne nuit dans ce camp de yourtes, après un massage de fin d‘après-midi qui remet aussi d’aplomb !
Nous étions au portes du désert de Gobi hier, et enfin, nous pénétrons plus avant.  Les premiers troupeaux de chameaux apparaissent.  Aucun point d’eau à l’horizon.  Noé s’émerveille devant les premiers mirages qu’il observe.  Nous faisons une courte pause ravitaillement, dans un village aussi désertique que ce qui l’entoure.  Enfin, presque.  Une bande de quelques enfants d’une dizaine d’années viennent à notre rencontre, et nous voilà engagés dans une semi-compétition de lutte mongole.  Le pauvre Noé se fait terrasser à plates coutures, mais ne se décourage pas : au contraire, ça le motive pour faire du sport plus intensément dès son retour à Tahiti. 
Vers midi, nous arrivons à quasiment au pied des falaises de Bayanzag, dans un champ de saxaul, où nous montons notre campement.  Les saxaul sont des arbustes, mais qui peuvent atteindre quelques mètres de hauteur, possédant deux types de racines, verticales lui permettant de puiser l’eau très profondément, et horizontales pour résister aux vents puissants. C’est un arbre n’existant qu’en Mongolie, très précieux pour son bois, et ça nous fait même bizarre de voir au milieu du désert des fils de fer barbelé clôturant des cultures de saxaul, pour les protéger des chameaux qui raffolent de leurs épines.  Les marmottes ont totalement disparues, et sont remplacées par de petits rongeurs qui filent autour des tentes, chassés par des aigles.  L’après-midi est tranquille.  Nous avons choisi la bonne saison pour visiter la Mongolie : pas trop chaud, pas trop froid, parce que dans le désert de Gobi, les températures atteignent celles du désert du Khorezm en plein juillet.  Un peu d e repos, un peu de soustraction, et au coucher du soleil, nous allons sur les falaises de Bayanzag, juste quand la lumière est propice à la photographie.  On les appelle aussi « les falaises flambantes » ou « le canapé rouge », en raison de leur couleur ocre.  C’est là qu’il y a 100 ans, des œufs et os de dinosaures ont été découverts, ce qui nous vaut une exploration du tonnerre par India Noé, persuadé d’avoir trouvé une trace d’œuf.  D’en-haut des falaises, nous apercevons les « 3 belles », les 3 sommets les plus hauts de la chaîne du Gobi-Altaï, où nous nous dirigerons demain.  


Gobi signifie en mongol «semi-désertique ».  Du haut des falaises, on a l’impression qu’une vaste prairie se trouve sous nos pieds, tant il y a d’arbustes et de petites herbes recouvrant le désert de pierres et de sable.  Mais surtout, il y a de la ciboulette !  Bon dîner en perspective !


Crapouillot se crapouillant dans le seul ru du village

Ninja go à l'entraînement!

De la glace dans le désert, c'est pas fort ça!

Incroyable: de la ciboulette en plein désert!

Falaises de Bayanzag


Je cherche les oeufs de dinosaures!

J'ai trouvé l'oeuf sur la tête de papa dinosaure!

Les ptérodactyles






Lundi 8 septembre 2014 – Chez les éleveurs de chameaux au pied des dunes chantantes de Khongor Els

C’est surtout dans l’omelette du petit matin que la ciboulette a fait fureur : Robert a adoré !  Comme quoi, il n’y a pas que les chameaux qui aiment ça dans le désert, comme disent les mongols !


Nous quittons notre campement féérique : c’est la première fois que nous dormions ainsi dans le désert, et c’est un instant magique.  Nous nous dirigeons à l’ouest des « 3 Belles », que nous distinguons bien ce matin à l’horizon, pour rejoindre, derrière, un camp de nomades, éleveurs de chameaux.  Encore un accueil chaleureux, comme si nous étions de la famille.  L’estomac de la gent féminine des rapporteurs, ne se prêtant guère aux expériences culinaires depuis 48 heures, craignait un pot d’accueil au lait de chamelle, mais se trouva fort soulagé devant un bol traditionnel de thé salé : ouf ! Noé est rapidement la coqueluche de la famille : un éleveur et sa femme, son fils et sa belle-fille.  L’emplacement est de choix :  devant nous, le vert du désert de pierres encore recouvert de touffes d’herbes et l’ocre de la chaîne de dunes de sable s’étalant le long des montagnes du Gobi-Altaï.  Un spectacle magnifique.  De suite après le déjeuner, nous sommes réquisitionnés pour aller aider à monter la yourte d’automne de la famille sur une colline voisine.  Il faut avouer que nous commençons à être des spécialistes : on se demande si on ne va pas importer le concept sur notre petite île ?!...  Un petit problème de maths pour Noé avant le départ : nous sommes 6 personnes, et il y a 2 mobylettes, combien de personnes montent sur une mobylette ? ou autrement dit, quelle est la moitié de 6 ?...Bah, oui !, c’est ça ! à 3 sur une mobylette roulant sur le sol instable de pierres et de sable.  Noé, calé entre le dos de notre éleveur de chameaux et le ventre de Robert, nous n’avions aucune inquiétude : mieux qu’un airbag ! Cette yourte-là est plus grande, avec 5 pans, et 2 couches de feutre plus 2 couches imperméables encore par-dessus.  C’est incroyable comme les 2 poteaux centraux qui semblent être juste posés sous le toit circulaire de la yourte sont en fait le cœur de l’édifice autour desquels tout se resserre.  On comprend mieux leur importance architecturale et symbolique.  Pendant que nous nous finissons d’installer la yourte, le petit Noé semble comme un poisson dans l’eau, enfin si on peut s’exprimer ainsi en ces lieux !  Comme il dit, « Je suis un Prince du Désert, maman, t’avais oublié ça ? ça coule dans mes veines. », et il n’a pas tout-à-fait tort…  En voyant le travail terminé, là encore, nous restons songeurs en nous disant que ces yourtes existent depuis des siècles, et que presque rien n’a changé…  Nous passons la fin d’après-midi à faire un peu d’école, des photos du coucher de soleil pour Jean-Pierre.  La soirée se termine sous la yourte-cuisine, un bol de potée, et des chants de Mongolie, de France et de Tahiti : la lune est pleine sous le désert de Gobi…  « Ca veut dire qu’il va y avoir des loups-garous. », conclue Noé, beaucoup moins romantique !

L'omelette à la ciboulette

La source du désert



Premières dunes de Khongor Els





3 ombres au tableau!

Mardi 9 septembre 2014 – La randonnée chamelière aux dunes de Khongor Els

Ouvrir la porte de la yourte le matin au réveil et avoir le spectacle des dunes sous les « 3 Belles » est un paysage qui nous émerveille autant que la veille.  Jean-Pierre est très attendu ce matin : son omelette à la ciboulette se fait désirer, les saveurs ayant été contées à nos hôtes hier apparemment. Mais seule la belle-fille de notre éleveur, Tuya, se joindra à nous pour le petit-déjeuner : tant pis pour les autres, trop occupés à retrouver les clés de la mobylette égarées la veille !  Enfin les fameux chameaux de Bactriane (domestiqués ceux-là, car ils en existent encore des troupeaux sauvages), animaux préférés des caravanes de la route de la soie et dont les mérites ne sont plus à vanter, sont déjà rassemblés au pied de notre yourte, et prêts pour la randonnée qui nous attend.  Le temps est idéal : soleil dans un ciel presque sans nuages et petit vent qui nous évite d’avoir trop chaud dans ce désert, juste comme il faut. Tuya bénit le voyage avec quelques gouttes de lait versées dans les airs devant la yourte, puis nous partons à 4 : Tuya, qui nous sert de guide, Noé et Jijgee sur un chameau, Jean-Pierre, et moi.  Mon chameau a sa bosse avant pendant lamentablement sur le côté gauche : veut-il ressembler à un dromadaire ? est-ce pour me laisser mieux admirer le paysage ?  Quant à Jean-Pierre, sous le vent, il profite à fond de l’haleine à la ciboulette pestilentielle de nos destriers !  Allez ! C’est parti !  Il y a une douzaine de kilomètres entre le camp de yourtes et les dunes, soit une heure et demie de chameau.  A environ deux tiers du parcours, le bienveillant Robert arrive avec son 4x4, prendre soin de son petit Shinkhuu, en lui portant de l’eau, des petits biscuits, et l’attendre sur le retour pour le ramener à la yourte s’il est trop fatigué : proposition sur laquelle sautera le petit chameau !  Au pied des dunes, on se rend compte comme elles sont grandes : on ne voit pas les sommets des montagnes derrière.  Evidemment, Noé finira en bonhomme de sable, partout, dans les chaussures, le slip,… on dirait qu’il y a plongé la tête la première ! 
Au retour, abandonné par notre aventurier en herbe, soi-disant prince du désert, nous nous essayons au trot de chameau : ça secoue, il faut avoir l’estomac et les fesses bien accrochées ! Impossible par contre de les faire partir au galop, ces paresseux.

Un bon plat de spaghettis à la sauce tomate au retour nous attend (encore ce Robert, une vraie mère !), et l’air de rien, ça nous a épuisé cette ballade.  Nous nous écroulons pour une petite sieste dans la yourte.  Après diner, nous sortons rassembler les chèvres afin de ne garder dans l’enclos que les petits encore allaités, pour le lendemain matin tirer le lait de leurs mères.  Un cercle est formé autour du troupeau, et à force de bras agités, le tri est vite fait malgré le nombre de têtes de bétail.  Perchés sur la colline, le spectacle est magique ce soir encore : à l’ouest, les rayons orangés du soleil couchant, et à l’est, le jaune pâle de la pleine lune se hissant derrière la montagne.  C’est juste ouf !...


La méharée fantastique

Khongor Els












Tri des chèvres

Biquet et biquettes

La pleine lune se lève

Mercredi 10 septembre 2014 – Le canyon glacé de Yoliin Am

Après nos adieux à nos éleveurs de chameaux, nous reprenons la route vers l’est, dans la région des canyons.  Après 3 bonnes heures de route cahin-caha, nous pique-niquons près d’un ru à la porte du canyon de Dungdene : une bonne salade de légumes et pommes, et ça nous fait du bien un peu de verdure.  On ne cuisine pas beaucoup les légumes en Mongolie en-dehors de chou, patates, carottes.  Après déjeuner, nous faisons une belle promenade dans le canyon, le long de la rivière.  A part maintenant, le canyon est dit glacé, car en hiver jusqu’en juin, la rivière gèle et des blocs de glace se forment en aval : une sorte de petit Perito Moreno.  La faune est abondante dans ces canyons : nous apercevrons des gerbis de Mongolie en pagaille, sorte de petits lapins-hamsters, des oiseaux, des aigles surtout (« Yoli » veut dire « aigle » en mongol), mais pas de loups, ni d’ours du Gobi, ni de léopards des neiges, ni de renards, ni d’ibex.  Nous ne les verrons qu’au petit musée d’histoire naturelle du Gobi, sous formes de peaux ou empaillés.  Intéressant et surprenant que ce petit musée au milieu du désert : il y a beaucoup d’animaux, mais surtout il y a les œufs de dinosaures fossilisés, enfin !  Pas que dans le musée d’ailleurs, ces œufs, qui servent aussi à délimiter les pas de yourtes…  C’est non loin de là que nous trouvons notre camp de yourtes pour la nuit, avec 2 heureuses surprises : une douche (même si un peu froide, la 1ère en 4 jours !), et du yaourt au lait de chèvre délicieux !


A l'entrée du canyon

Comité de yacks d'accueil





Là, c'est gelé en plein hiver, c'est-à-dire 10 mois sur 12!

Tombera? tombera pas?


Gerbie de Mongolie

L'encens

Bébé tyrannosaure sortant de son oeuf!

Jeudi 11 septembre 2014 – Tsagaan Survaga

On the road again to Oulan-Bator au milieu d’un no man’s land : voilà qui résume la journée d’aujourd’hui, marquée par un paysage plat et désertique, auquel fait place un paysage lunaire aux couleurs incroyables, juste vers notre camp de yourtes, et aussi la nouvelle panne de voiture, cette fois, sans âme qui vive à des kilomètres à la ronde.  C’est reparti, il faut que ça tienne encore 2 jours !

Et pour l’info météo du jour, il neige depuis quelques jours au lac Khövsgöl, où nous étions il y a une dizaine de jours !

On the road again

Et la panne again!

Jean-Pierre, très préoccupé par la panne!

Tsagaan Survaga

Noé (tel le loup des steppes se léchant les babines) et Ano




Shooting de Jean-Pierre dans le Gobi


Vengeance de shooting!




Mangera? mangera pas?



Yourte de luxe?...!

Vendredi 12 septembre 2014 – Baza Gazriin Chuluu

Noé quitte sa petite copine mongole, Ano, nom d’une princesse mongole du 16ème siècle, avec qui il a été bien content de jouer un peu depuis hier soir.  On a bien hésité à le laisser en Mongolie, mais bon, comme il dit, «  vous allez vous coller la plaie jusqu’au bout ! » !

On continue la route dans le Gobi, un peu d’asphalte pour reposer nos fessiers, puis de nouveau la piste : un rythme presque monotone interrompu par la nouvelle panne du réservoir d’eau !  Jean-Pierre avait raison, la 1ère réparation n’a pas tenue, mais comme il aurait dû parier jusqu’à Oulan-Bator et non Tsetserleg : il aurait gagné une bouteille de vodka !  Bref, ç’est reparti pour une réparation au plastique chauffé de cette satanée fissure, en croisant les doigts !

Et puis, soudain, après ces étendues presque interminables de désert de pierres, des montagnes de granit érodées par le temps apparaissent comme disposées en champ.  On dirait des galettes posées les unes sur les autres, des bosses de chameaux pour d’autres, un chapeau chinois, ultimate énormosaure… Ce sont les monts de Baza Gazriin Chuluu.  Tout près de là, sur une des montagnes, un creux est perforé dans la roche et il s’y trouve une source d’eau guérissant les maladies oculaires.  Une cuillère scotchée sur un manche en bois se trouve là, et nous permet de prendre quelques gouttes de cette eau miraculeuse, et de nous en asperger les yeux, chacun notre tour.  Noé assure qu’il voit beaucoup mieux depuis !  On découvre aussi, niché dans les roches, une grotte où des moines venait d’abriter en chemin vers leur monastère, désormais en ruines, détruit par les soviétiques, et où la nature a repris ses droits.  Franchement, ils étaient bien les moines, là, abrités du vent et des intempéries, et on se demande comment les russes ont pu les trouver !  Certains restes de murs sont encore peints en bleu et on aperçoit aussi des inscriptions tibétaines sur les roches un peu plus haut.  Le vent s’est bien levé, et refroidit l’atmosphère : il faut trouver un endroit pour notre dernière nuit… sous la tente !, et pas la peine de compter sur une yourte autoroutière.  Là, il n’y a pas de routes !  Nous optons finalement pour un petit coin entre des roches, mais pas de feu au programme de cette dernière soirée sous la tente : trop de vent, et la pluie commence à être de la partie.  Du coup, pas d’école aujourd’hui (en même temps, c’était notre dernière soirée tous ensemble), et vite au lit après le diner, au chaud sous les duvets !

Baza Gazriin chuluu





La source aux yeux




Le monastère perdu

Vautours






Apéro en douce

Samedi 13 décembre 2014 – De retour à Oulan-Bator

Le réveil fut… glacial !  Un vent à décorner les bœufs, comme on dit – enfin, peut-être n’est-ce pas une expression locale…  Démonter la tente, enfiler vite fait le petit-déjeuner (le pain préparé par Jijgee hier soir est pourtant délicieux – on a pris la recette !), et monter en 4ème vitesse dans la voiture : direction Oulan-Bator, la capitale.  Cela nous fait tout drôle de retrouver les coups de klaxons et les bouchons à l’entrée de la ville.  Nous étions revenus à l’état sauvage ces dernières semaines, coupés du monde, et c’était bien loin d’être déplaisant !

Jijgee et Robert nous déposent à notre hôtel, où nous prenons avec un délice non masqué une douche, chaude, bien méritée !  Il ne nous reste plus beaucoup d’habits propres, il faut bien l’avouer, et nous enfilons nos dernières affaires rutilantes pour aller voir en fin d’après-midi un spectacle folklorique en compagnie de nos 2 amis de ces dernières semaines.  Mais finalement, il n’y aura pas de théâtre, annulé pour cause de fête du petit naadam.  Jijgee et Robert nous offrent à chacun de magnifiques bols de cuivre, gravés à notre nom avec un message de paix écrit en mongol : nous sommes touchés, plus que les mots ne peuvent l’exprimer.  Robert nous quitte : il doit aller chercher sa femme à la campagne dont la voiture est tombée en panne, sans avoir pu lui-même changé son réservoir d’eau, et nous lui souhaitons bonne chance !  Jijgee nous fera le plaisir de passer la soirée avec nous, dans un bon pub d’Oulan-Bator.  C’est la fin de notre voyage en Mongolie : demain, nous nous lèverons tôt.  Pékin nous attend : une nouvelle aventure !



Coup de gueule de Jean-Pierre :

Cette fois le coup de gueule sera tout petit.  Nous attendions un pays magnifique, nous l’avons eu.  Nous attendions des gens sympathiques, ils sont extraordinaires.  Ce séjour en Mongolie fait partie à n’en pas douter des grands souvenirs déjà, mais incroyablement indélébiles.  Tout a été plus encore que nous l’attendions et même le climat, comme s’il était connivent, s’en est mêlé.  A part un peu de froid, une ou deux fois, nous n’avons pas souffert de la rigueur des steppes d’Asie centrale.  Le seul bémol, mais qui n’ira pas à l’encontre de la Mongolie, concerne Ulaan Baatar, que tous les guides décrivent comme la ville la plus moche du monde.  Il n’en est rien.  Il s’agit d’une ville, sans grande pompe, certes, mais une ville qui demeure agréable pour quelques jours?  Seul peut-être le climat (Ulaan Baatar étant la capitale la plus froide du monde) aura pu donner l’illusion d’une ville horrible.  Les deux jours passés ont été fort agréables.  Cependant, les Mongols  sont conscients que leur capitale, sinon d’être laide, n’est en tous cas pas à la hauteur du reste de ce merveilleux pays, à telle enseigne qu’un projet pharaonique est en cours pour faire de cette capitale (Ulaan Baatar 2020), une ville digne de ce pays.  D’ailleurs comme disait notre guide : « chaque fois que je pars en excursion et que je reviens, un nouveau bâtiment est apparu ».

Conclusion de Noé : (rapportée par maman)

C’est sans nul doute le pays qui a ces derniers mois le plus conquis le cœur de notre petit rapporteur.  Pourtant, il y a eu beaucoup de temps passé sur la route, mais la joie de courir dans les steppes, les animaux, l’état sauvage de ce pays, ont effacé ces heures de trajets.  Sans parler de la fascination pour le grand guerrier qu’était Chinggis Khan.
Comme il dit lui-même : « J’adore ce pays.  Les gens ici sont tellement gentils, enfin, peut-être pas les plus gentils au monde, parce qu’il y a ce pays, là, où il n’y a pas d’armée et que personne ne va les attaquer.  C’est comment déjà ? » - « Le Costa Rica »
Le plus cadeau que l’on puisse lui avoir fait, c’est de l’avoir baptisé d’un prénom mongol, et de s’être vu comparé à un vrai petit mongol.  Nul doute que le petit Shinkhuu reviendra un jour dans ces steppes, dans le désert de Gobi, pour d’autres moments inoubliables…




1 commentaire:

  1. Le ragoût de marmottes!!!
    Oui j'ai lu le reste! Mais le ragoût de marmottes!!! ...
    Happy aussi de lire vos aventures!!!
    Hélène

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